L’art du portrait

Vautrin1

Les portraits qui suivent se présentent comme des arbres dépourvus de leur feuillage et de leurs fruits. Le texte est grammaticalement correct mais nombre de « caractérisants » ont été gommés, regroupés dans la fenêtre ci-dessous. Pour « colorer » le texte comme son auteur s’y est essayé, récrivez-les avec votre clavier à la place qui leur convient. Le bouton « Aide » offre une première lettre. Attention ! une faute de frappe et la réponse est incorrecte.

   à favoris peints      bouquets de      certain      Comme un juge sévère      constante      digne de Juvénal, et2      douteuse      épaisses      et d’un roux ardent      et liantes      fortement      grosse      imperturbable      malgré son air bonhomme      ni      ni ses occupations      obligeant et      prématurées      profond et      rafistolée      soigneusement   
   Entre ces deux personnages et les autres, Vautrin, l’homme de quarante ans, , servait de transition. Il était un de ces gens dont le peuple dit : Voilà un fameux gaillard ! Il avait les épaules larges, le buste bien développé, les muscles apparents, des mains , carrées et marquées aux phalanges par des poils touffus . Sa figure, rayée par des rides , offrait des signes de dureté que démentaient ses manières souples . Sa voix de basse-taille3, en harmonie avec sa gaieté, ne déplaisait point. Il était rieur. Si quelque serrure allait mal, il l’avait bientôt démontée, , huilée, limée, remontée, en disant : Ça me connaît *. Il connaissait tout d’ailleurs, les vaisseaux, la mer, la France, l’étranger, les affaires, les hommes, les événements*, les lois, les hôtels et les prisons. Si quelqu’un se plaignait par trop, il lui offrait aussitôt ses services. Il avait prêté plusieurs fois de l’argent à madame Vauquer et à quelques pensionnaires ; mais ses obligés seraient morts plutôt que de ne pas le lui rendre, tant, , il imprimait de crainte par un regard plein de résolution. À la manière dont il lançait un jet de salive, il annonçait un sang-froid qui ne devait pas le faire reculer devant un crime pour sortir d’une position équivoque. , son œil semblait aller au fond de toutes les questions, de toutes les consciences, de tous les sentiments. (…) Des gens moins superficiels que ne l’étaient ces jeunes gens5 emportés par les tourbillons de la vie parisienne, ou ces vieillards6 indifférents à ce qui ne les touchait pas directement, ne se seraient pas arrêtés à l’impression que leur causait Vautrin. Il savait ou devinait les affaires de ceux qui l’entouraient, tandis que nul ne pouvait pénétrer ses pensées . Quoiqu’il eût jeté son apparente bonhomie, sa complaisance et sa gaieté comme une barrière entre les autres et lui, souvent il laissait percer l’épouvantable profondeur de son caractère. Souvent une boutade par laquelle il semblait se complaire à bafouer les lois, à fouetter la haute société, à la convaincre d’inconséquence avec elle-même, devait faire supposer qu’il gardait rancune à l’état social, et qu’il y avait au fond de sa vie un mystère enfoui.

   Honoré DE BALZAC, Le père Goriot    

1 Vautrin : Analyse du personnage  .

2 Juvénal : Poète latin dont les Satires dénoncent certains abus sociaux, politiques et moraux sous Domitien (Ier - IIe s. P.C.N.)

3 Basse-taille : Voix d’homme plus grave que la voix de baryton  .

4 Gloria : (Populaire) Café mêlé d’eau-de-vie ou de rhum.

5 Ces jeunes gens… désigne Eugène de Rastignac, jeune ambitieux rêvant de s’introduire dans la haute société parisienne.

6 Ces vieillards… fait référence au père Goriot.